Société des Médecins de Vienne 1887-061/1887
  • S.

    SOCIÉTÉ DES MÉDECINS DE VIENNE.

    Séance du 1er avril 1887.

    Vienne, 2 avril 1887.


    Vices de conformation.

    M. Friedinger présente un nourrisson
    dont l'anus n'est pas situé sur la ligne mé­
    diane.

    Il annonce que, dans l'Hospice des enfants­
    assistés, se trouve actuellement une nourrice
    munie d'un clitoris ressemblant à un membre
    viril parfaitement développé et muni d'un
    canal par lequel elle émet l'urine.


    Mycosis fongoïde.

    M. Kaposi. Le sujet que je vous présente
    est atteint de mycosis fongoïde, maladie en­
    core peu connue en raison de sa rareté.
    C'est un homme de 26 ans, d'origine russe.
    Le début de sa maladie remonte à 1878.
    À ce moment, il présentait, au niveau du
    côté gauche de la poitrine, ou au-devant, des
    taches rouges de la dimension d'un écu.
    Au bout de quelques mois ces taches furent
    remplacées par des tumeurs du volume d'une
    noix qui finirent par disparaître complète­
    ment.
    En 1882, le malade séjourna dans la clini­
    que du professeur Neumann. Un médecin l'ait
    alors, le montre, qui présentait une tumeur
    volumineuse au niveau de la sixième apophyse épineuse dorsale. Cette tumeur s'éten­
    dait peu à peu en avant.
    Depuis 1884, le sujet est particulièrement
    incommodé par son affection. Comme vous le
    voyez, il présente deux ordres de lésions.
    Ce sont d'abord de nombreuses tumeurs
    d'un rouge légèrement, dures, indolentes et dont
    le volume peut égaler celui du poing et qui
    occupent le tronc et les épaules. Quelques­
    unes de ces tumeurs sont exulcérées.
    De plus, on trouve principalement sur le
    thorax un aspect marbré, lié à une infiltra­
    tion du chorion.
    Sur l'abdomen il y a une ulcération qui
    occupe la place d'une tumeur ayant eu le
    volume d'un œuf de poule.

  • S.

    Le malade ne présente aucune autre alté­
    ration.

    L'affection dont il est atteint doit être qua­
    lifiée de mycosis fongoïde, mot introduit en
    1872 par Alibert. Elle a du reste été patiem­
    ment étudiée par de nombreux méde­
    cins, Lebeuf, Vidal, Brocq, etc. La descrip­
    tion des altérations que donne Bazin en 1867,
    est encore aujourd'hui excellente.

    En Allemagne, le premier qui la décrivit
    fut Hebra, mais ses observations n'ont
    avait pu faire en France. J'ai moi-même ob­
    servé 4 cas, dont 3 hommes et 1 femme
    (admettons six mois).

    Dans la première, il y a un début en eczé­
    ma. Ensuite, il y a le stade d'infiltration et de
    graissons. Après 3 à 4 ans commence la pé­
    riode d'eczéma, où le derme s'épaissit. Puis,
    sur la surface des régions infiltrées, là
    où la peau est encore saine, se développent
    des tumeurs d'une forme, d'une couleur et d'une
    taille variables. Quelques-unes de ces tumeurs dis­
    paraissent par la suite. Enfin survient la
    dernière période dans laquelle on voit les
    ulcérations. Alors paraissent les symptômes
    célèbres qui font que le malade survient la
    mort qui est généralement la conséquence
    d'une complication pulmonaire ou rénale.

    Dans un autre cas, la maladie a débuté en
    eczéma au début. Il paraît d'abord des taches
    rouges légèrement coulantes, rappelant que
    la variole. Elles durent un certain temps et font
    éruption. Ici encore, la démangeaison pour
    être plus intense. Les tumeurs sont multiples.
    Au bout d'un temps variable, on voit appa­
    raître, dans le même ordre, les trois dernières
    périodes dont j'ai déjà parlé plus haut.

    Je n'ai pas observé encore d'exemple de la
    troisième variété dans laquelle les tumeurs
    fongoïdes surviennent sans aucune manifes­
    tation cutanée antérieure. Ces tumeurs appa­
    raissent dès le début. Elles se dé­
    veloppent et provoquent la cachexie qui se
    termine par la mort. La thérapeutique
    est au commencement. Le terme de mycosis
    fongoïde est assez défectueux. Le mot myco­
    sis suppose une infiltration parasitaire due
    à un champignon à mycélium. De plus, Ali­
    bert range le mycosis dans un groupe d'af­
    fections cutanées qui n'ont rien de commun.
    La maladie n'a rien de commun avec la véro­
    leuse. Elle n'est pas mycosique. Elle consiste
    dans une infiltration cellulaire du derme sans
    grande modification du stroma ni des vais­
    seaux. L'altération n'est pas analogue à l'é­
    czéma. On peut la considérer avec Ranvier ce tissu
    comme une adénite. Ils sont dans le mycosis
    une lésion liée à la diathèse lymphoïde, une
    affection de nature leucémique. Mais il faut
    faire attention que la maladie clinique telle
    qu'est dans le mycosis ne rappelle rien de la
    leucémie.

    Étant donné la dernière des tu­
    meurs cutanées de nature leucémique. Mais
    l'observation de Brocq et de Besnier, où les
    tumeurs avaient tout au plus le volume d'un
    pois et la symptomatologie était tout autre. J'ai
    vu de la leucémie cutanée qui était distincte
    un cas de lymphodermie pernicieuse.
    D'autres auteurs, en particulier Köbner,
    considèrent ces tumeurs comme des granu­
    lomes. Ils invoquent l'eczéma du début qui
    n'est pas différent de l'eczéma. Mais d'autres
    beaucoup de ces tumeurs ne sont pas précédé
    d'eczéma. Il faut alors qu'il s'agit d'un
    granulome spécial, tout de même que dans
    du lupus et de la Lèpre.

    Hochstuger, chez un malade étudié par
    Aspity, a vu dans les vaisseaux et les tissus
    malades un streptocoque. Il a cultivé ce mi­
    croorganisme et a déterminé une infiltration
    de la peau chez le lapin après injection des
    produits de culture.

    Chez le malade que je vous présente, M. Lust­
    garten n'a pu déceler le microorganisme et
    M. Köbner dans un autre cas a obtenu le
    même résultat négatif. Je ne suis donc pas
    autorisé à accepter la nature parasitaire du
    mycosis fongoïde.

    Je crois qu'il s'agit de sarcomes de la peau.
    Il y a plusieurs variétés de sarcomes cutanés
    dont quelques-uns peuvent disparaître puis
    revenir. De ces variétés celle qui se rapproche
    surtout du mycosis, est le sarcome multiple.
    J'ai donné ce nom à des cas dans lesquels
    l'affection se développe simultanément aux
    mains et aux pieds et dont j'ai déjà recueilli
    26 observations. Je ne puis décider encore si
    l'eczéma fait partie de la maladie ou est sim­
    plement une cause occasionnelle.

    On a signalé la régression de ces tumeurs
    à la suite de l'érysipèle. Chez notre malade le
    phénomène a été observé. M. Köbner a obtenu
    une guérison complète à la suite d'une médi­
    cation arsenicale énergique. J'ai également
    administré ce médicament à doses croissantes
    et j'ai vu en divers points diminuer l'infil­
    tration et les tumeurs.

    Je tiendrai la Société au courant de la mar­
    che ultérieure du mal et de l'effet de l'arse­
    nic.

    Dr SIGM. F R E U D.